- Devant le refus catégorique du régime de transition d'autoriser un parti islamique, la nébuleuse islamiste (qui englobe tout le spectre des mouvements de toutes les inspirations politiques, confessionnelles, rituelles ou idéologiques) est en train de faire son entrée sur l'arène politique en ordre dispersé.
Et même si certains de ses adeptes n'excluent pas de jouer le jeu du pouvoir en acceptant de rejoindre des formations politiques déjà reconnues (façon d'attendre d'y voir plus clair), ils ne rejettent pas la possibilité de tenter une coordination politique entre eux, à un moment ou un autre du processus électoral.
"Quel que soit notre mode d'action politique ou la formation que nous aurons à fréquenter, nous convergeons vers le même but et le même idéal", explique ce militant islamiste indépendant.
Ce sentiment d'exclusion de l'action politique s'est cristallisé depuis le discours du Chef de l'État au Trarza. Un discours qui a sonné le glas de leur légalisation attendue et a édifié les uns et les autres sur la vision que se font les autorités de la transition du projet politique islamiste. "Les choses sont désormais claires depuis que le Chef de l'État a montré ses dents, et le combat politique est inégal dans de telles conditions", fait remarquer un autre militant de ce mouvement.
La position politique dans laquelle se trouve actuellement cette mouvance n'est pas comparable -selon certains observateurs- à celle de 1991, bien que plus d'un estime qu'elle correspondrait, pratiquement, à un retour à la case de départ. "La différence entre 1991 et 2006 réside dans le fait qu'en 91, le mouvement islamiste était plus fort. Son seul handicap était que le pouvoir de l'époque non seulement refusait de le reconnaître, mais voulait en même temps le récupérer pour son compte et s'en servir pour légitimer tous ses actes politiques visant à assurer sa stabilité".
"Et la mainmise ne s'arrête pas là, bien des hommes d'affaires et de riches commerçants avaient leurs entrées ou leurs cartes de visite d'islamistes et utilisaient ce mouvement pour justifier leurs activités économiques ou à des fins anti-syndicales pour mater les revendications des travailleurs", commente un observateur.
Flux et reflux
La situation en 2006 est tout de même un peu différente. "Le refus de reconnaître une action politique sous le couvert de l'islam trouverait sa justification -selon ses tenants- essentiellement dans le climat international peu propice aux partis politiques à connotation religieuse et surtout islamique et les raisons avancées par le pouvoir, ainsi que tout le discours sur la nature de cette constitution qui s'inspire, selon lui, de la sainte religion, de même que l'argument du caractère global de l'Islam qui ne permet pas l'exclusivisme, ne sont que des faux fuyants", note encore cet observateur de la scène politique.
Une peur qui est aussi en partie accentuée par le climat de psychose engendré par les bilans politiques et militaires des mouvements qualifiés de radicaux dans le monde musulman, et surtout dans la sous-région, une décennie après les événements douloureux d'Algérie, et une année après l'attaque de Lemghaity par le GSPC de Bellaouar.
La mouvance islamiste en Mauritanie, qui a subi les contrecoups et les aléas de la politique nationale et internationale, souffre de mauvaise organisation et de profondes fissurations. C'est ainsi qu'on peut rencontrer des groupes islamistes jeunes ou émergents qui ne connaissent pas leurs aînés et qui, parfois, ne les reconnaissent pas, ou, en tout cas, ne se reconnaissent pas à travers eux.
Ces jeunes islamistes qui sont, pour leur grande majorité, issus des mouvements "salaffistes" et qui sont formés pour la plupart à "l'école des événements" (Intifada palestinienne, guerres du Golfe, Afghanistan ou ceux du 11 septembre la télévisions aidant) qui a favorisé la prédominance d'une interprétation de type radical et mondialisé, ne reconnaissent même pas la tutelle des anciens qu'ils considèrent comme domestiques, tout comme ils refusent les valeurs de la démocratie qu'ils considèrent comme "bidaa" (innovation hérétique, actes ou paroles qui n'ont pas une trace dans le Livre, la Sunna ou l'Ijmaa' de la Oumma). Le groupe d'islamistes qui croupit sous les verrous depuis plus d'un an et qui est en instance de jugement ferait partie de cette aile dite radicale.
La Mauritanie qui est considérée par tous comme un pays à cent pour cent de rite malékite et "ach'aarite" ne l'est pas (ou plutôt ne l'est plus) pour autant. En effet, depuis la prolifération des maisons d'édition spécialisées et l'émergence d'une production éditoriale à grande échelle, en plus de la rupture des frontières intellectuelles au sein du monde musulman du fait des échanges et des voyages, une certaine lecture unique des textes s'est dégagée annonçant définitivement le début de la fin des "madhahib" ou voies rituelles.
Cette tendance met en avant "el qawl ew ed-delil el arjah", qui signifie l'indice le plus fort ou le plus pondéré de chaque "medh'heb". Et donc un "medh'heb" unique, synthèse de tous les autres, est désormais entre les mains des wahabites "teblighistes" (du verbe "bellagha" qui signifie transmettre). Les islamistes qui quittent le rite malékites "achaarite", désormais très nombreux, ne désavouent pas l'Imam Malek Ibn Anass, imam de Médine et son "fiqh" (théologie) qu'ils considèrent très bien, mais quittent sa voie qui en est différente. Une voie qui a été élaborée bien après sa mort et qu'ils estiment comme un excellent outil entre les mains du pouvoir.
La mouvance islamique a aussi été -à l'image de toute la classe politique mauritanienne- gangrenée par tous les maux sociaux comme le tribalisme et le régionalisme. Le courant islamiste mauritanien qui est resté le plus pacifiste et le plus ouvert parmi tous les courants de ce type, a surtout souffert plus que tout autre mouvement politique de cette balkanisation, en raison de l'interpénétration des différentes lectures, mais surtout à cause de l'interprétation "quelquefois hasardeuse" des concepts "ouçoulien" (originels, référentiels) tels que "jelb el menfa'a wa dar'e el mef'çede" ,qui peut se traduire par l'apport du bienfait et la proscription du préjudice, ou "irtikab akhaf adhararayn" qui peut se traduire par le choix du moindre mal, ou encore le principe sacro-saint de "ta'atu weliyi el emr" qui signifie, littéralement, la soumission absolue à celui qui a en charge l'expédition des affaires, le sultan en l'occurrence.
Un principe dont certains se sont servi politiquement à l'extrême pour justifier des choix ou des options politiques d'un pouvoir donné, à travers un prisme culturel parfois très sectaire, qui n'a pas toujours la dimension nationale.
La mouvance islamique en Mauritanie se compose de: -"Jamaat Ed-Daawa Wat-Tabligh" (groupe de prêche et de prédication), plus communément connu sous le nom "Douaat" (prédicateurs). -"Jamaat Ed-Daawa Wal Irchad"; groupe connu sous le nom de "Jamaa Es-Salafiyya" d'obédience wahhabite. -"El Jamaa Et-Tourabiya"; groupe inspiré par la ligne de l'islamiste soudanais Hassan Et-Tourabi. -"El Jamaa El Medkhaliya"; groupe qui s'inspire de la ligne politique du théologien El Medkhali et qui s'en prendrait à la société et épargne les institutions. -"Jamaa Salafia Al Jihadiya ou Et-Takfiriya ou Al-Qitaliya"; ce groupe est la branche armée de l'Internationale Islamiste ou "El Qaaida". -"Jamaat El Ikhwan Al Mouslimin" ou le groupe des "Frères Musulmans". - Des Oulémas et Imams traditionalistes (parmi lesquels se recrutent les Oulémas du pouvoir). - Des islamistes indépendants en rupture de ban. - Les confréries et les marabouts qui se sont mis de la partie en prenant conscience de l'intérêt de la proximité du pouvoir, et ont commencé à jouer sur l'arène des mouvements islamistes, aussi bien pour s'attirer les largesses et la sympathie des monarchies du Golfe, que pour contrecarrer l'action de sape que leur font subir leurs ennemis jurés wahabites et salafites. Le groupe des frères musulmans, qui s'était implanté en Mauritanie à la fin des années 60 avait fait ses preuves, dès le début, dans le domaine social, dans l'enseignement traditionnel (écoles coraniques et mahadras), dans l'entretien des orphelinats et les jardins d'enfants, et à travers les clubs d'encadrement des jeunes et des femmes (à l'image de Nadi Muç'aab et Nadi Aaicha), et même dans le domaine de l'enseignement professionnel (ateliers divers).
Il avait profité de dons en provenance des pays du Golfe et notamment de la générosité de riches particuliers. Générosité qui s'inscrit très souvent au titre de voies de dépense prescrites par la Chariaa et particulièrement recommandées ("zakat", pluriel "zakawat" ou aumônes, "infaqh" ou dépenses dans la voie de Dieu, "ihsan" ou bienfaisance). Dons qui ont contribué dans une large mesure à édifier des mosquées, à financer des ONGs de secours et à financer des instituts et des centres de formation professionnelle.
Les "Frères Musulmans", un grand groupe politique qui a toujours été un partenaire social très bien implanté, était surtout fin manœuvrier dans ses actions jugées équilibrées et réalistes, en raison de leur caractère qui accepte le débat contradictoire et qui mise sur un "islah" (réforme au sens musulman du terme) par des voies pacifiques, et par des actions sociales dont les résultats s'inscrivent dans le long terme. Et c'est de là que la scission au sein de la mouvance islamique s'était consacrée définitivement entre deux visions différentes du changement: l'une rapide et brusque et l'autre lente et pacifique.
Commerce et amalgames
On constate que les pouvoirs politiques qui s'étaient succédé à la tête de ce pays, en particulier celui de Ould Taya, n'ont jamais tenu compte de cette différence d'approche et envoyaient systématiquement à chaque fois en prison côte à côte les uns et les autres. En Mauritanie, "la Djamaa des Frères Musulmans" n'a pas ses banques, ni ses maisons d'édition ou sa presse, ni ses circuits économiques parallèles comme c'est le cas dans certains pays musulmans où elle siège parfois au Parlement.
Ce mouvement a même souffert du tarissement des ressources dû au gel des fonds des organisations islamiques dans le cadre de ce qu'on appelle communément "la lutte contre le terrorisme" et qui ne faisait pas la distinction entre les fonds de bienfaisance, les fonds caritatifs et les financements destinés aux groupes armés. Cette djamaa qui s'était organisée au sein de "l'Association Culturelle Islamique", était aussi très implantée dans les instances de l'UTM (Union des Travailleurs de Mauritanie) et du Patronat (Confédération Générale des Employeurs de Mauritanie) au début des années 80. C'était sous le régime de Ould Haidalla qui leur était assez favorable. Ils avaient milité alors pour l'instauration de la Chariaa.
Résultat: l'application de quelques peines et un recul important de la notion du droit humain. "Et très rapidement le mouvement s'était rendu compte que la loi islamique ne s'arrêtait pas aux sanctions des fautifs, mais que l'application de ces sanctions requiert un environnement de justice économique et sociale dont les conditions ne sont pas encore réunies", se souvient une source de ce mouvement.
En 1991, le parti islamique de "l'Oumma", qui n'a jamais été reconnu par les autorités, avait été pourtant fortement infiltré par l'Etat lors de sa gestation en raison de ce que représente l'Islam en tant que levier de pouvoir dans la société mauritanienne. Un pouvoir qui, de surcroît, n'a pas aussi hésité à opérer plusieurs purges au sein de cette mouvance en envoyant ses principaux dirigeants en prison.
La branche politique de la mouvance islamique qui tente, depuis les premières heures du déclenchement du processus démocratique en 1991 et jusqu'à nos jours de se faire une place sur l'échiquier politique, n'arrive pas à fléchir un pouvoir qui continue à voir dans le refus de reconnaître un parti islamique un choix stratégique indiscutable. Cette attitude avait pourtant été décriée sous le régime de Ould Taya -y compris par des voix occidentales- comme très préjudiciable à la stabilité du pays, en ce sens qu'elle peut, si elle se conjugue avec la répression et la mal gouvernance, tendre à radicaliser les plus modérés comme on a pu l'observer ailleurs.
Les relations diplomatiques avec l'Etat hébreu, largement désavouées par une majorité écrasante de Mauritaniens, ne sont pas de nature à calmer les choses, et ne font que contribuer à ce climat de radicalisation en servant d'argument et de leitmotive des contestations politiques à tendance islamiste. Récemment, lors des élections présidentielles de 2003, les islamistes contestataires du régime de Ould Taya qui se sont trouvés obligés de se regrouper au sein du parti SAWAB, faute d'alternative, ont soutenu Haidalla, tandis qu'une minorité d'autres étaient du côté d'Ahmed Ould Daddah (des soutiens qui leurs avaient valu l'emprisonnement et le procès).
La mouvance islamique aujourd'hui, bien que dispersée au sein des formations politiques et évanouie dans la nature, a largement contribué à la réussite du "oui" à la constitution à la faveur de la "fatwa" du Cheikh Mohamed El Hacen Ould Dedew (chef spirituel et charismatique). Et grâce aussi à la campagne du groupe des "Réformateurs Centristes" de Jamil Mansour, Moctar Ould Mohamed Moussa, Ahmedou Ould Wediaa et Cheikhany Ould Beybe et qui constitue une formation politique non reconnue affiliée à une coalition de 10 partis connue sous le nom de "Coalition des Forces du Changement Démocratique" qui regroupe les partis APP, FP, MDD, PMUC, PUDS, le RFD, RPM (TEMAM), RC, HATEM et UFP.
Entre marteau et enclume
La fatwa que Cheikh Dedew avait lancée en appelant les fidèles et les citoyens à voter en faveur des amendements de la constitution, lui avait valu la critique des radicaux. Des tracts qui protestaient contre sa fatwa, demandaient à le bannir et appelaient à ne plus prier "derrière lui" étaient distribués et lus dans toutes les mosquées de la ville. Ould Dedew qu'on dit très proche et très écouté du Colonel Ould Mohamed Vall qui l'aurait même reçu à plusieurs reprises, tout comme le groupe des réformateurs centristes, n'ont pas - à ce qu'on dit - désespéré de voir leur action politique autorisée et leur groupe à exercer au grand jour.
Ces islamistes qualifiés de modérés et réformateurs n'auront-ils pas besoin d'être confortés dans leur position et leur démarche pour tout l'effort qu'ils entreprennent afin d'endiguer un éventuel déluge? Cela reste apparemment un dilemme pour le pouvoir.
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